Homme, tu possèdes par nature une volonté qui ne connaît ni obstacles ni contraintes: voilà ce qui est écrit ici dans ces entrailles. Je te le ferai voir d'abord à propos de l'assentiment. Y a-t-il quelqu'un qui puisse t'empêcher d'adhérer à la vérité ? Personne. Et quelqu'un qui puisse te forcer d'admettre l'erreur ? Personne; tu vois bien que, en cette matière, ta volonté ne rencontre ni contrainte, ni obstacle, ni empêchement. Eh bien! en est-il autrement dans le cas des désirs et des tendances ? Qui peut vaincre une tendance, sinon une autre tendance ? un désir ou une aversion, sinon un autre désir ou une autre aversion ? Si l'on me menace de mort, dis-tu, on me contraint ? Ce n'est pas cette menace qui te contraint d'agir, c'est l'opinion que tel ou tel acte est préférable à la mort; c'est donc bien encore ton jugement qui t'y oblige; c'est la volonté qui oblige la volonté. Si cette partie de nous-mêmes, que Dieu a émise de lui pour nous la donner, avait été rendue par lui sujette aux obstacles et aux contraintes venus de lui ou d'un autre être, il ne serait plus dieu, il ne serait plus pour nous l'être providentiel qu'il doit être. Voilà ce que je trouve dans les victimes; voilà les signes qu'elles donnent. Si tu le veux, tu es libre; si tu le veux, tu n'auras ni reproche ni réprimande à adresser à personne; tout sera selon ta volonté, qui est aussi celle de Dieu.

 

Epictète, Entretiens , Livre 1, ch. XVII 

 

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